Quels moyens de preuve sont autorisés dans un procès civil ?
Les modes de preuve se divisent en deux catégories distinctes : les modes de preuve parfaits (qui doivent être pris en compte par le juge) et les modes de preuve imparfaits (dont la prise en compte et l’évaluation sont laissées à la discrétion du juge).
De ce fait, la nature du moyen de preuve (parfait ou imparfait) a un impact sur sa valeur probante.
Les modalités de preuve parfaites
On va retrouver 3 modes de preuves parfaites :
- Preuve par le serment décisoire
- Preuve par aveu judiciaire
- Preuve écrite
Au sein du vaste univers juridique, les preuves sont les piliers qui soutiennent les arguments et consolident les revendications. Dans ce contexte, les modes de preuve parfaits sont des éléments clés qui peuvent faire pencher la balance en faveur d’une partie. Mais que sont-ils, et en quoi sont-ils si cruciaux?
Pour faire court, les modes de preuve parfaits, parfois appelés également modes de preuve irrévocables, sont des éléments de preuve qui, de par leur fiabilité et leur force probante, ne laissent subsister aucun doute quant à l’affirmation qu’ils soutiennent. En ce sens, ils constituent un appui solide et incontestable pour les parties qui les présentent : 1. L’aveu judiciaire, par exemple, est une reconnaissance formelle et délibérée des faits par la partie adverse, émanant directement de cette dernière. De ce fait, il est considéré comme une preuve irréfutable en droit.2.
- Preuve par serment décisoire
Dans le monde juridique, le serment correspond à une déclaration solennelle réalisée oralement pour authentifier la véracité d’un fait.
La preuve par le serment figure parmi les preuves irréfutables en raison des conséquences graves découlant d’un faux serment. Bien que l’aspect religieux ait disparu, la sanction pénale prévue en cas de faux serment confère à ce mode de preuve son caractère solennel et sérieux (Article 434-13 du Code pénal).
Le nouvel article 1384 du Code civil encadre ce mode de preuve. Il énonce que « le serment peut être déféré, en tant que décisif, par une partie à une autre, afin d’en faire dépendre le jugement de la cause. Le juge peut également le déférer d’office à l’une des parties. »
Plus précisément, dans le cadre d’un serment décisif, la partie qui prête serment l’emporte. Le serment constitue une affirmation solennelle qui peut être imposée à une partie par son opposant. Sachant cela, si elle refuse de prêter serment, elle peut renvoyer le serment à celui qui l’avait initialement déféré.
Si l’autre partie refuse de prêter serment, cela équivaut à un aveu implicite et elle perd le procès. Seul le serment décisif, parmi tous les serments, est considéré comme une preuve irréfutable s’imposant au juge.
Preuve par reconnaissance judiciaire
- L’aveu
L’aveu se définit comme la déclaration ou révélation d’un fait qui avait été précédemment occulté.
Le nouvel article 1383 du Code civil introduit la notion d’aveu en énonçant que celui-ci est « la déclaration par laquelle une personne admet un fait susceptible d’avoir des conséquences juridiques à son encontre. Il peut être judiciaire ou extrajudiciaire ».
En effet, un aveu peut être judiciaire, dans ce cas il est indivisible à l’encontre de son auteur (le juge doit tenir compte de l’aveu dans sa globalité) et il est irrévocable (nouvel article 1383-2 du Code civil).
Tout comme le serment décisif, la reconnaissance judiciaire constitue une preuve irréfutable et le juge ne peut l’écarter. Il est à noter que ce n’est pas le cas de l’aveu extrajudiciaire, qui constitue une preuve imparfaite.
- Preuve écrite parfaite
La preuve documentée est un moyen de preuve principalement employé pour démontrer l’existence d’actes juridiques. Elle permet ainsi d’établir la réalité de tels actes.
Qu’est-ce qu’un acte juridique ?
Un acte juridique est la manifestation écrite de la volonté de plusieurs parties visant à produire des effets juridiques. Le contrat en constitue un exemple parfait.
La preuve documentée irréfutable fait partie des preuves a priori établies avant la survenance du litige.
Cette catégorie regroupe :
- L’acte authentique dont les conditions sont énoncées par le nouvel article 1369 du Code civil. Sa force probante est telle, que pour contester un acte authentique, il faut s’inscrire en faux contre l’acte, avec le risque d’être condamné à une amende civile en cas d’échec.
- La copie d’acte authentique qui possède la même force probante que l’acte authentique, à condition d’être une reproduction fidèle et durable de l’original.
- L’acte sous seing privé dont les conditions sont précisées aux articles 1367, 1375 et 1376 nouveaux du Code civil. En ce qui concerne sa force probante, il convient de souligner que l’acte sous signature privée fait foi jusqu’à preuve du contraire.
La loi du 13 mars 2000 a adapté les règles traditionnelles aux exigences de l’écrit électronique. L’article 1375 du Code civil précise les conditions d’admissibilité de la preuve électronique. La preuve électronique est recevable lorsque l’identité du souscripteur est assurée, ainsi que l’intégrité du document numérique.
Les preuves imparfaites
Le caractère probant des indices imparfaits est soumis à la libre évaluation du juge.
On distingue cinq types de preuves imparfaites :
- La preuve par serment supplétif ou requise d’office
- La preuve par l’aveu extrajudiciaire
- La preuve écrite imparfaite
- La preuve apportée par témoignage
- La preuve par présomption ou indice
- La preuve par serment supplétif ou requise d’office
Le serment consiste en une déclaration solennelle prononcée oralement dans le but d’établir la véracité d’un fait.
Ce serment est réglementé par l’article 1384 du Nouveau Code civil.
Pour le serment supplétif ou requise d’office, le juge, insatisfait des preuves présentées, demande à une des parties de confirmer solennellement, sous serment, la réalité du fait contesté afin de l’éclairer sur les circonstances du conflit.
Ce type de serment représente une preuve imparfaite laissée à la discrétion du juge.
- La preuve par aveu extrajudiciaire
L’aveu s’entend comme la reconnaissance ou la révélation volontaire d’un fait précédemment dissimulé. L’article 1383 du Nouveau Code civil précise qu’il y a une distinction entre l’aveu extrajudiciaire et l’aveu judiciaire.
Contrairement à l’aveu judiciaire, l’aveu extrajudiciaire est admis uniquement lorsque la loi autorise la preuve par tous moyens.
De ce fait, sa valeur probante dépend entièrement de l’estimation faite par le juge (Article 1383-2 du Nouveau Code civil).
- La preuve écrite imparfaite
Le concept de preuve écrite imparfaite englobe tous les documents écrits qui ne sont pas des preuves écrites parfaites (lettres, livres de compte de commerçant, notes personnelles, etc.).
En ce qui concerne les copies, elles ont une valeur probante égale à celle de l’original à condition d’être fiables. En effet, l’article 1379 du Nouveau Code civil exige :
- Une présomption de fiabilité irréfutable pour la copie d’un acte authentique
- Une présomption simple pour les preuves électroniques
On peut également mentionner le commencement de preuve par écrit, qui n’est considéré comme une preuve que s’il « rend vraisemblable le fait allégué » (Article 1362 du Nouveau Code civil).
De plus, cet article stipule que, pour être valable, le commencement de preuve par écrit ne doit pas être favorable à celui qui l’a rédigé.
- La preuve apportée par témoignage
Le témoignage désigne la déclaration d’une tierce personne ayant pour objet d’établir la véracité d’un fait.
Selon l’article 1381 du Nouveau Code civil : « La valeur probante des déclarations effectuées par un tiers dans les conditions du code de procédure civile est laissée à l’appréciation du juge. »
Le témoignage compte parmi les types de preuves laissés à l’appréciation libre du juge. Les témoignages directs et indirects sont admis. Toutefois, l’appréciation de l’impartialité du témoignage est souvent prévue par la loi.
Ainsi, par exemple, l’article 259 du Code civil stipule que « les descendants ne pourront jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux ».
- La preuve par présomption ou indice
En droit, la présomption correspond à l’inférence d’un fait inconnu à partir d’un fait connu suite à un raisonnement juridique.
La présomption légale correspond à la conclusion que tire le juge ou la loi d’un fait connu vers un fait inconnu dont l’existence est rendue vraisemblable par le premier fait.
Dans une démarche similaire, la présomption judiciaire consiste en les indices qui permettent d’inférer la réalité d’un fait par le biais d’une photographie, d’une expertise, etc…
Le juge doit ainsi inférer un fait inconnu à partir d’un fait connu. En d’autres termes, il incombe au magistrat d’évaluer, selon sa conviction personnelle, si l’élément présenté possède un degré de preuve suffisamment convaincant pour être pris en compte.
Ainsi, la présomption s’avère être un moyen de démonstration entièrement soumis à l’évaluation discrétionnaire du juge.